2 - La science et l’évolution des connaissances :
A – L’astronomie - un modèle d’évolution de la connaissance et de la pensée humaines :
a – Du paléolithique à l’époque historique :
La voûte céleste a toujours intrigué les hommes et l’observation des astres est apparue très tôt, pour des raisons diverses (religion, divination ou calendrier agricole). Ainsi, l’astronomie, dont l’origine remonte bien au-delà de l'Antiquité, est probablement
l’une des plus anciennes des sciences naturelles.
Il n'existe cependant pas d'information précise concernant les observations du ciel au
Paléolithique, l’écriture étant apparue bien plus tard. Toutefois, l’occupation et l’organisation de certains lieux le laissent suggérer : par exemple, l’orientation de certaines grottes ornées permettant à la lumière solaire de pénétrer lors du solstice d’été (
Lascaux)
Plus tard, au néolithique, des alignements de pierres, tels les grands cercles mégalithiques comme Nabta Playa en haute Egypte, vieux de 6 000 à 6 500 ans, ou Stonehenge en Angleterre, érigé il y a près de 5000 ans, tenaient compte de la position du soleil à certaines époques de l’année. Mais, là encore, en l’absence d’écriture, il est
difficile d’accorder une fonction astronomique à ces édifices.
Le cercle mégalithique à Nabta (Egypte) au moment de son relevé en 1992.
Stonehenge (Angleterre).
Selon toute vraisemblance, la fonction de ces édifices était avant tout religieuse, et leur disposition
se contentait de tenir compte de la position du soleil à certaines époques de l'année.
b - Epoque historique :
1 – Mésopotamie :
C’est en
Mésopotamie, à partir du III° millénaire avant JC, que l’on commence à appréhender l’importance de l’observation des astres, grâce aux
tablettes d’argile où les Babyloniens et les Assyriens consignaient les comptes rendus de leurs observations astronomiques...
Représentation de constellations sur une tablette d'astronomie
retrouvée dans la Bibliothèque d'Assurbanipal de Ninive (VIIe siècle av. J.-C.).
British Museum.
L’interprétation des signes célestes à
visée prédictive était la préoccupation essentielle d’une astronomie qui
subsiste aujourd’hui sous l’appellation d’astrologie.
À cette époque, les Babyloniens disposaient déjà de tablettes représentant le planisphère céleste et indiquant la position des constellations observées, ainsi que de spécimens rudimentaires de
sphère armillaire.
2 – Grèce et Egypte :
Les Grecs utilisèrent eux aussi ces instruments qu’ils perfectionnèrent tout en reprenant la division du zodiaque équatorial en
12 constellations.
Ces sphères furent en usage jusqu’au XVIIe siècle.
Sphère armillaire.
Anaximandre, est l’auteur de la
première théorie astronomique tentant de représenter la terre dans le cosmos
en dépassant l’apparence des choses. Alors que les civilisations antérieures voyaient le ciel comme une voûte surplombant une Terre plate, c’est lui, le premier, qui donna à l’Univers la forme d'une sphère, dont la Terre, cylindrique, occupait le centre. Cette hypothèse, donna naissance au
géocentrisme, permettant, pour la première fois, de
comprendre l’apparition et la disparition des astres à l’aube et au crépuscule.
Le Soleil disparaît mystérieusement, puis il réapparaît. |
Le Soleil passe sous la Terre avant de resurgir de l’autre côté. |
Anaximandre n'alla toutefois pas jusqu'à assigner à la Terre une forme sphérique : c’est seulement au Ve siècle après JC que cette nouvelle vision de l’Univers apparut.
C’est à la Grèce classique (-500 à -336) que revient le mérite d’avoir fait de l'astronomie
une recherche à part entière, à même de fournir une explication des phénomènes astronomiques,
indépendante des préoccupations de calendrier agricole, de divination ou de culte religieux.
Au sein de l'école d'Alexandrie (Basse-Egypte), l’œuvre de
Ptolémée (vers 150 de notre ère) marque l'apogée de l’astronomie antique : sur la base des connaissances et des théories de son époque (les
épicycles), ce savant élabora le système planétaire
géocentrique qui porte son nom, et qui fut adopté par les occidentaux et les arabes.
Géocentrisme.
Malgré de nombreuses variantes
[cf : place de la Terre dans l’univers], ce système géocentrique, avec une Terre immobile autour de laquelle toutes les sphères tournent quotidiennement, demeurera la théorie en vigueur jusqu’à l’adoption de la théorie de Copernic.
Héliocentisme.
3 – Europe et Moyen-Orient :
L’
expansion islamique (636-732) va donner une forte impulsion à cette science. En effet, pour naviguer sur mer et s’orienter dans le désert, les conquérants arabes avaient besoin de données précises.
C’est avec les réformes politiques de Charlemagne (742-814), que l’astronomie passe du statut de recherche à celui de
discipline d'enseignement : l’empereur l’inclut dans le programme traditionnel (géométrie, arithmétique et musique) des écoles administrée par l’église.
A la Renaissance (XV° siècle) l’astronomie s’impose en tant que
système de description géométrique du monde. Elle se consacre uniquement aux positions avérées des étoiles et des planètes, et à leur calcul dans un espace en trois dimensions.
Elle se distingue désormais de l'astrologie qui s'intéresse essentiellement aux positions apparentes des astres sur une voûte plane pour prévoir l’avenir.
Les constellations représentées arbitrairement.
Les étoiles de la Grande Ourse dans le ciel :
les distances sont indiquées en années-lumière (AL).
L’astronomie enseignée dans les universités européennes au XIIe siècle, subit une impulsion nouvelle avec les travaux de
Nicolas Copernic qui s'est instruit dans les grandes universités italiennes. Ses observations de la Lune l’amènent à concevoir un
système où le Soleil serait le centre du cosmos (du grec kósmos : « monde ordonné »).
Après la publication par
Johann Bayer du premier catalogue d'étoiles de l'époque moderne, et à partir des observations et mesures de la position des planètes faites par
Tycho Brahe,
Johannes Kepler va énoncer en 1609 les lois qui portent son nom. Relatives au mouvement des planètes, ces lois décrivent leurs
trajectoires elliptiques autour du soleil et les variations de vitesse qui les affectent selon leur position.
54-science_et_religions
Le modèle géométrique du système solaire selon Kepler.
C’est alors qu’un tournant décisif va déterminer tout l’avenir de l'astronomie.
En effet, c’est en 1610 que Galilée décrit, dans son livre « Sidereus Nuncius », la
lunette astronomique qu'il a mise au point et qui lui a permis de découvrir les phases de Vénus et les quatre satellites de Jupiter.
L'univers
perd alors le centre qui lui était attribué, et le géocentrisme de Ptolémée va en âtre durablement ébranlé car le système héliocentrique établi par Copernic et Tycho Brahe
concorde avec les observations. Pourtant, en contradiction avec le dogme catholique, Copernic sera attaqué par l’Inquisition et il devra se rétracter en 1633.
Toutefois, si ces découvertes permettent de décrire correctement le mouvement des planètes, , elles n’expliquent pas pourquoi les orbites sont des ellipses plutôt qu’un cercle.
C’est
Isaac Newton qui répondra à cette question en 1687, dans Philosophiae Naturalis Principia Mathematica (Principes mathématiques de la philosophie naturelle). Il y montre comment le mouvement des astres et la chute des corps, peuvent s’expliquer par l’action d’une
force qui fait s’attirer mutuellement tous les objets. Ainsi, la force d’attraction du Soleil règle-t-elle le mouvement des planètes. Quant à la force d’attraction de la Terre, elle détermine aussi bien la
chute des corps à sa surface que l’orbite de la Lune.
Auparavant, en 1668, il a mis au point le premier télescope à réflexion composé d'un miroir primaire concave, innovation quilui a permis de corriger les aberrations chromatiques de la lunette astronomique de Galilée.
En France, à l’époque du siècle des Lumières, l'
Encyclopédie de Diderot et d'Alembert éditée de 1751 à 1772
va contribuer à diffuser la nouvelle représentation du monde héliocentrée, une révolution pour l’époque.
4 - Époque contemporaine :
Les progrès des techniques permettent aujourd’hui d’explorer l’univers bien au-delà du système solaire. On découvre que les étoiles sont des
objets très lointains : la plus proche de nous, Proxima du Centaure, est à plus de 4 années-lumière. La spectroscopie astronomique révèle également que ces étoiles, bien que très différentes en taille, masse et température, sont
similaires à notre Soleil.
En découvrant également d’autres galaxies dans l’univers lointain, les astronomes vont résoudre, au début du XXe siècle, l’
énigme de la voie lactée : ils vont comprendre que les étoiles innombrables qui nous entourent constituent elles aussi une galaxie, et que leur disposition à nos yeux dépend de la place occupée par notre système solaire.
Voie lactée vue à 360° depuis laTerre.
Emplacement du système solaire dans la voie lactée.
Peu après, les astrophysiciens vont
découvrir l'expansion de l'Univers, grâce à
E. P. Hubble qui a montré que les galaxies s'éloignaient les unes des autres à une vitesse proportionnelle à leur distance du soleil.
http://effet-doppler.awardspace.com/domaine/astronomie.html
Nous avons vu
[effet doppler] que la vitesse à laquelle un objet s’éloigne allonge les longueurs d’onde : les sons deviennent plus graves pour l’observateur qui entend le véhicule s’éloigner.
Le même phénomène est valable pour les ondes lumineuses : le spectre de raies des molécules présentes dans les étoiles va de plus en plus se
décaler vers le rouge en fonction de la vitesse d’éloignement.
La vitesse d’éloignement des étoiles se traduit par un allongement de la longueur d’onde de la lumière.
D’où un décalage vers le rouge des bandes d'absorption de l'élément mercure.
La cosmologie va faire de grands progrès au cours du XXe siècle grâce à la théorie de la relativité : l’évolution de l’univers à partir du
big-bang et la découverte du
rayonnement fossile préluderont à l’observation des
trous noirs.
Ainsi, la représentation de notre environnement a beaucoup changé depuis que notre œil
soumis aux illusions d’optique nous montrait une Terre plate et nous plaçait au centre de l’Univers sous une coupole d’astres divers.
L’observation des astres a peu à peu transformé notre vision : dans un premier temps, le soleil est devenu le véritable centre de notre univers, jusqu’à ce que l’invention de la lunette en repousse les limites. La Terre, tout comme son environnement, est devenue sphérique, mais elle demeurait le centre de l’univers.
Une
nouvelle évolution de la pensée humaine a dû alors s’imposer. Malgré les certitudes acquises, si difficiles à expurger, la Terre a été reconnue comme une simple planète dans un Univers immense.
Toutefois, notre compréhension de l’univers reste encore
limitée, et une origine divine s’impose encore.
Fort heureusement, grâce à la science, l’homme accepte peu à peu une naissance plus modeste, issue de la matière.
Malgré tout, comme de nombreux mystères demeurent, il a toujours besoin de réponses. Celles-ci ne découlent plus d’un savoir immuable, mais elles imposent une
remise en question permanente et l’élaboration de nouvelles hypothèses : par exemple l’intervention d’une très mystérieuse «
matière noire » qui aurait le pouvoir de maintenir la cohésion des galaxies et permet de répondre à certaines interrogations.
Cependant, son mode de pensée a considérablement évolué depuis le paléolithique, passant de la
représentation du monde aux tentatives d'
explication, avant de s'attacher à en
comprendre les phénomènes.
1 - L'homme utilise la nature pour se nourrir et il la représente sur des supports (grotte de Lascaux).
2 - L'homme observe et tente d'expliquer les phénomènes naturels.
Avec les dernières avancées de la science, le mystère pourrait-il se réduire ?
Quelles sont ces nouvelles découvertes ?
Grâce aux trous noirs et à leur rôle créateur, les astrophysiciens nous font découvrir le dernier venu, mis en avant par la physique quantique : le
trou noir primordial.
3 - L'homme cherche à comprendre les phénomènes naturels.
B – Naissance de notre univers et trou noir primordial - les explications en présence :
a – Le trou noir primordial, et nos limites à le représenter :
Grâce à l’étude des trous noirs et à la toute nouvelle compréhension qu’ils apportent, naît aujourd’hui une toute
nouvelle genèse de l’univers : l’existence de toutes ses composantes émergerait de leurs caractéristiques extraordinaires.
Les étoiles et les galaxies ? Elles seraient l’aboutissement des impressionnants jets de matière expulsés par les trous noirs super massifs.
L’espace-temps ? Il serait la conséquence d’une multitude de micro trous noir reliés entre eux par un phénomène quantique.
Le big-bang ? Il naîtrait d’un trou noir primordial préexistant dans un autre univers d’où le nôtre émergerait.
En effet, alors que ces monstres destructeurs sont devenus les architectes de l’univers dans lequel nous vivons, un trou noir primordial en serait
le créateur. Un nouveau dieu, celui de la science, serait en passe de remplacer le Dieu de l’Antiquité.
Formation de notre Galaxie et de notre Univers.
Ce trou noir primordial présente des caractéristiques exceptionnelles. Il n’est pas né d’une étoile à trois dimensions comme toutes celles qui constituent notre univers, mais d’une étoile qui en possède
quatre : la longueur, la largeur, la hauteur… auxquelles s'ajoute une
dimension perpendiculaire aux trois autres que notre cerveau ne peut se représenter.
Notre cerveau, qui n’a cessé d’évoluer, est aujourd’hui capable de représenter un volume en trois dimensions sur une surface qui n’en a que deux (une carte plane de notre terre sphérique en est un excellent exemple). Depuis la découverte des lois de la perspective, il peut aussi représenter en 3D un objet dessiné sur une feuille de papier.
Objet aplani. |
Objet représenté en perspective. |
Malgré cela , il lui est toujours impossible d’imaginer un univers en trois dimensions (le nôtre) issu d’un objet qui en possède quatre.
Par chance, la curiosité humaine ne peut se contenter de réponses absolues, et un
mécanisme déjà observé dans l’antiquité, la séparation de l’astrologie primitive et de l’astronomie, se répète aujourd’hui : « l’Être divin explicatif de toute chose »,
sans pour autant disparaître, laisse de plus en plus de place à un recherche de réponses.
Si l’astrologie rassure (ou inquiète) sur l’avenir…
…l’astronomie émerveille dans le présent.
Ce questionnement se retrouve dans toutes les disciplines et nous permet d’établir un parallèle avec les
questionnements de l’enfant.
Si la curiosité stimule conscience et connaissances…
…les réponses définitives pourraient bien les scléroser.
Comme dans son enfance où il était guidé par la curiosité, l’homme ne s’est jamais satisfait de vérités définies une fois pour toutes.
Il conserve aussi, de l‘enfant, le raisonnement analogique : pour mieux comprendre l’évolution d’une étoile quadridimensionnelle, il peut la comparer à celle d’une étoile massive, dans l’univers qu’il connaît.
De même qu’il connaît l’évolution d’une étoile en trou noir…
…l’homme peut se représenter l’évolution d’objets appartenant à d’autres univers….
...et peut imaginer son propre univers à la surface d’un autre univers.
b – Le principe holographique :
C’est en 2014 qu’un groupe de physiciens dirigés par Robert Mann (université de Waterloo - Canada) va, pour la première fois, donner forme à cette nouvelle genèse : le big-bang résulterait d’un trou noir déjà existant.
Ce nouveau scénario part d’un principe dont l’origine remonte aux années 1970 :
le principe holographique.
À l’époque les théoriciens Jacob Bekenstein et Stephen Hawking explorent déjà les dimensions de l’espace : ils montrent ainsi que l’information engloutie dans un trou noir classique, c’est-à-dire un objet en trois dimensions, est proportionnelle à la surface de son horizon, laquelle n’en possède que deux.
C’est ainsi qu’un problème difficile à résoudre, connaître par exemple le contenu d’un volume inaccessible, peut être traité mathématiquement d’une manière plus simple, à savoir:
déduire l’intérieur à partir de la surface.
Pour prendre un exemple plus accessible, la surface d’une sphère est décrite par son diamètre :
Inversement, cette surface permet de déduire son volume et son rayon :
Par la suite, en 2000, plusieurs théoriciens, dont Georgi Dvali, à l’université Ludwig-Maximilians de Munich, ont pu montrer comment un univers semblable au nôtre apparaît sous la forme d’une membrane à 3D au niveau de l’horizon du trou noir primordial.
Surtout, ils sont parvenus à démontrer que la loi de la gravitation au sein de cette membrane tridimensionnelle est
identique à celle de notre univers.
Aujourd’hui, ce principe est devenu un postulat : « tout système physique occupant une région de l’espace peut être donné par une théorie définie
sur la seule frontière de cette région ».
Ce scénario résout rien de moins que le mystère de la création de notre Univers.
Son origine est repoussée :
il ne part plus d’un point de l’espace infiniment petit et sans origine. Il résulte de l’effondrement d’une étoile quadridimensionnelle
qui préexistait dans un autre univers.
Non seulement les équations qui permettent de
modéliser le big-bang sont exactement les mêmes que celles qui permettent de modéliser les trous noirs, mais le modèle holographique
résout deux autres problèmes :
-Tout d’abord
l’homogénéité du cosmos.
Avec cette nouvelle façon d’envisager l’apparition de l’univers, un problème disparaît car le commencement n’a plus lieu une fraction de seconde avant l’expansion : il est repoussé vers le passé, au moment de l’effondrement de l’étoile 4D, ce qui laisse au plasma brûlant le temps de s’équilibrer.
Les spécialistes de l’université de Waterloo ont d‘ailleurs pu vérifier cette théorie et leurs prédictions s’avèrent cohérentes avec les observations (on notera cependant que c’est également le cas du modèle standard).
- Par la même occasion, un autre problème, le « paradoxe de l’information », est résolu. Des informations peuvent en effet traverser un trou noir
et ressortir « par ailleurs » dans un autre univers. Elles ne sont donc pas perdues.
Toutes ces données, qui demandent de traiter des masses d’informations, n’appartiennent plus, aujourd’hui, au domaine de l’intelligence humaine. Une capacité bien supérieure, relevant de l’intelligence artificielle, est devenue indispensable.
« Etre conscient impose :
- la capacité d'être curieux de toute chose,
- la volonté de chercher des réponses,
- le courage de renoncer aux explications erronées,
- et la nécessité d'ouvrir les yeux sur les changements qui s'opèrent. »